Un Spicilège - Mot-clé - Roman2024-03-27T16:13:20+00:00Deidreurn:md5:f61c55f88ac06cf1e2c34df1e686f20fDotclearMa Tempêteurn:md5:31e79cdbd3d357427c8fb8c93c8bdc3e2024-03-27T17:13:00+00:002024-03-27T17:13:00+00:00DeidreRomanLectureRomanThéâtre <p><img src="http://unspicilege.org/public/.matempete_s.jpg" alt="" class="media-right"></p>
<p><em>Ma Tempête</em> est un livre dont j'ai entendu parler dans une newsletter et dont les thématiques m'ont tout de suite paru intéressantes.<br>
David est un metteur en scène de théâtre qui, alors qu'il se retrouve sans activité à la suite de l'échec de son dernier projet, est dans l'obligation de garder sa fille, la crèche étant en grève. Il se décide donc, lors de cette improbable journée, à lui raconter sa vision de<em> La Tempête</em> de Shakespeare. <br>
Je ne m'attendais pas, cependant, à être autant touchée par ce livre que j'ai trouvé particulièrement juste, vrai, sincère, empli d'inspiration et de passion.<br>
<br>
Il brasse en effet beaucoup de thématiques, qui trouvent écho dans l'œuvre de Shakespeare. Le parallèle est rapidement fait entre le metteur en scène David et le magicien Prospero, personnage de <em>La Tempête</em> coincé sur une île avec sa fille et grand manipulateur des différents protagonistes de la pièce. On est d'ailleurs plongé dans la sincère admiration et la connaissance que David a de Shakespeare, aussi bien l'artiste que son œuvre. Cette proximité ira jusqu'à inspirer David et sa femme pour le prénom de leur fille, Miranda, identique à celle de Prospero. Comme lui aussi, David est en échec et en rivalité avec son frère. <br>
<br></p>
<blockquote><p>Après le drame, il y a la tragédie. Quand on dépasse le drame, on ne souffre plus. La tragédie, c'est la joie. Dans le drame on peut sauver quelque chose, dans la tragédie il n'y a plus d'espoir. C'est au-delà de la douleur : un abandon, un lâcher-prise.<br></p></blockquote>
<p><br>
Parallèlement au petit théâtre des hommes, Éric Pessan amorce également une intense réflexion sur l'art, sa nature profonde, sa fonction fondamentale dans la société, son utilité, sa valeur intrinsèque qui s'oppose au besoin toujours plus pressant de rentabilité. Il nous dit tout des difficultés que rencontrent les milieux artistiques, de la précarité d'un statut d'intermittent de plus en plus remis en cause par les institutions car devenu encombrant.<br>
<br>
On ne peut pas aimer l'art et les artistes sans être touché par <em>Ma Tempête</em>, par sa poésie infinie et sa vérité sans filtre. Parfait équilibre entre ce qui nous fait rêver, réfléchir, évoluer dans l'art, et ce qui le rend aussi fragile, nous convaincant de l'obligation qui est la nôtre de le soutenir et de le protéger.</p>
<pre>
Ma Tempête
Éric Pessan
Aux Forges de Vulcain
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Ma-Temp%C3%AAte#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/172Délivrez-nous du bienurn:md5:d3678256ea8b8c24d7a70e9a401c43b62024-02-28T16:47:00+00:002024-02-28T16:47:00+00:00DeidreRomanLectureRomanRoman noir <p><img src="http://unspicilege.org/public/.delivreznous_s.jpg" alt="" class="media-right"></p>
<p>Quelle claque que ce roman qui restera malheureusement le seul de Joan Samson. <br>
Paru en 1976, il conte l'histoire de l'arrivée dans une petite ville rurale du New Hampshire d'un drôle de commissaire-priseur venu de la ville. Aidé des forces de l'ordre, il commence à organiser des ventes aux enchères avec les biens dont les habitants, parmi lesquels la famille Moore, acceptent de se défaire "pour la bonne cause" : donner des moyens à la sécurité et au développement de la ville. Les Moore se rendent pourtant compte que le nouveau maître de la ville ne compte pas s'arrêter de sitôt, alors que tout le monde semble pris dans un effroyable engrenage.<br>
<br>
Il m'a été très difficile de lâcher <em>Délivrez-nous du bien</em> avant la fin tant la mécanique lentement mise en place est efficace. Propulsé dans l'impasse que les Moore semblent obligés d'emprunter, il est difficile de reprendre son souffle tant on a l'impression que le mur va bientôt être percuté.<br><br></p>
<blockquote><p>Perly, figé, voyait l'agitation se répandre. <br>
"Souvenez-vous seulement de ceci, dit-il enfin d'une voix caverneuse qui tranchait nettement dans la confusion. Tout ce que j'ai fait, vous m'avez laissé le faire."</p></blockquote>
<p>Joan Samson décrit parfaitement le phénomène d'emprise, en plongeant profondément dans la psychologie des personnages des Moore, oscillant tout au long du récit entre effroi, soumission et rébellion. Satellites de cette famille en détresse, les autres personnages, tout aussi justes, complètent les points de vue de réactions différentes.<br>
<br>
Furieuse dénonciation du capitalisme, Délivrez-nous du bien en décrit tout à fait les mécanismes, tout en détaillant avec violence le choc des valeurs entre ville et ruralité. Magistral de bout en bout.<br>
<br></p>
<pre>
Délivrez-nous du bien
Joan Samson
Traduit par Laurent Vannini
Monsieur Toussaint Louverture
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/D%C3%A9livrez-nous-du-bien#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/167Les Derniers cow-boys françaisurn:md5:0872183ac852509742e9eb7dacdfa8fd2023-09-06T17:03:00+01:002023-09-06T17:03:00+01:00DeidreRomanLectureRomanRoman noirRoman social <p><img src="http://unspicilege.org/public/.derniers_cow_boys_s.jpg" alt="" class="media-right" /></p>
<p>C'est une drôle d'expérience que celle de lire Léonel Houssam, qui, à la sortie de ce court roman, se faisait encore appeler Andy Vérol.
Directs, crus, sans précautions ni censure, sans prudence ni ménagement, ses textes sont des aiguilles chauffées à blanc qui plongent immédiatement dans le regard confortable de l'habituel et fait exploser les globes du conformisme.<br />
<br />
Dans ce roman, il narre la fuite éperdue d'un jeune flic abandonné par sa femme, qui, dégoûté en prime des agissements de ses collègues cent fois plus délinquants que ceux qu'ils prétendent combattre, démissionne pour tomber sous l'emprise d'une sorte de gourou aussi inspirant que tordu.<br /></p>
<blockquote><p>On fait clapoter la surface de l'eau/avec/un/peu/de/mousse avec la paume de nos mains. Elle me dit que je suis cinglé. Je lui réponds : « C'est ma façon à moi d'être perdu.» Je le dis comme si j'étais elle. L'eau. Comme si nous étions fusion.</p></blockquote>
<p><br />
A travers cette histoire sordide, à travers ses personnages maudits, à travers une succession de scènes répugnantes, Andy Vérol nous livre un texte frénétique, dont l'extrême violence, dont la grossièreté abjecte n'est que le miroir un peu trop efficace des obscénités de notre société. Sous couvert de provocation, c'est une dénonciation franche, un pamphlet aiguisé qui nous est proposé, pour peu qu'on réussisse à se détacher le sens premier des mots. <br />
Par la puissance de sa plume, Andy Vérol réussi le tour de force de garder la lecture captive tout en enchaînant l'insoutenable et sa maîtrise du verbe a fini de me conquérir. <br />
<br />
<em>Les Derniers cow-boys français</em> en rebutera sans doute plus d'un. C'est une lecture choquante à plus d'un titre. C'est cependant également un texte d'une force remarquable.</p>
<p>N'oubliez pas de vider la baignoire.</p>
<pre>
Les derniers cow-boys français
Andy Vérol / Léonel Houssam
Pimientos/Pylône
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Les-Derniers-cow-boys-fran%C3%A7ais#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/144Laidlawurn:md5:f9327785b7ffb2878dd60c209c4b15e22023-06-14T16:38:00+01:002023-06-14T16:38:00+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresLecturePolarRoman <p><img src="http://unspicilege.org/public/.Laidlaw_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Voici que j'achève (les mauvaises langues diront "enfin !") mon challenge 12 mois 12 livres, 12 (masto)potes par ce roman qui m'a été conseillé par Pololasi (mille mercis !).<br />
<br />
<em>Laidlaw</em> s'inscrit dans la plus pure tradition des polars noirs : un crime sordide (le viol et le meurtre d'une jeune femme), un univers glauque (les bas-fonds de Glasgow), un héros avec une part d'ombre non négligeable : l'inspecteur Jack Laidlaw, compétent mais dépressif, qui souhaite retrouver le meurtrier autant pour clore son enquête que pour le soustraire à la justice populaire, qui pourrait s'avérer expéditive.<br />
<br />
En effet, s'il en a l'air, <em>Laidlaw</em> s'émancipe pourtant rapidement des carcans du roman noir en y additionnant une dimension sociale conséquente, et la psychologie de son héros se révèle plus subtile qu'a priori.<br />
<br /></p>
<blockquote><p>Il s'agissait de tout ce qu'une femme n'avait pu retirer d'une relation, et de la dignité qu'elle avait préservée en dépit de cela, il s'agissait de tout ce qu'un homme avait caché par rapport aux promesses dont il ne savait probablement pas comment il les avait faites. Il s'agissait d'orgueil préservé et d'orgueil perdu.</p></blockquote>
<p>La lecture de <em>Laidlaw</em> m'a été infiniment triste. Le regard que porte le héros éponyme sur la société qui l'entoure y est pour beaucoup. Semblant souvent être le seul à vouloir ramener un peu de raison dans un monde gangrené par la violence, l'autoritarisme et l'hypocrisie, je fus vite gagnée par ses propres désillusions. <br />
Le roman est ponctué de nombreuses considérations sur la vie, la société, et l'infini pessimisme qui s'en dégage finit par peser trop lourd.<br />
L'écriture de William Mcilvanney s'avère de plus redoutablement efficace dès qu'il s'agit de décrire le tragique se jouant en quelques secondes, en un regard, en une parole, et quelques scènes semblant anodines ont réussi à me remuer.<br />
<br />
Le malaise a d'ailleurs persisté un moment, on peut dire que Laidlaw fut une lecture marquante.<br />
<br />
Pensez à boire un café fort, après la lecture, et faites un sourire à vos voisins...</p>
<pre>
Laidlaw
William Mcilvanney
Traduit par Jan Dusay
Rivages/Noir
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Laidlaw#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/136Du champagne, un cadavre et des putes, Tome 3urn:md5:6919b27c1e2f5a1a268925c7b7b598b32023-05-08T21:37:00+01:002023-05-08T21:37:00+01:00DeidreRomanLectureRomanRoman social <p><img src="http://unspicilege.org/public/.du_champagne_un_cadavre_et_des_putes_tome_3_s.png" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Les deux premiers tome de Du champagne, un cadavre et des putes sont parmi les œuvres qui ont le plus marqué ma vie de lectrice (pour savoir ce que j'avais à dire du tome 1 c'est <a href="https://atraverslamarelle.org/lu-du-champagne-un-cadavre-et-des-putes-tome-1-tristan-edern-vaquette">ici</a>, pour le tome 2 c'est <a href="https://unspicilege.org/index.php?post/Du-champagne%2C-un-cadavre-et-des-putes%2C-Tome-2">là</a>). C'est dire si j'ai attendu ce tome avec impatience !</p>
<p>S'il s'inscrit dans la continuité des deux précédents, il marque également une rupture forte dans la perception que j'en ai eu : fini de contextualiser, il est temps de rentrer dans le dur ! <br />
<br />
Dans ce tome, nous alternons entre les passages du journal d'Alice dans lesquels elle parle de sa condition d'escort, et même plus généralement de la condition des prostituées (Super-Alice contre les sales putes, avouez que ça se pose là !), avec ceux des auditions formelles ou informelles de Lawrence, dialogues tournant au monologue et cristallisés autour de la même idée : quelles sont les causes et les conséquences de la stigmatisation active subie par les prostitués.<br />
<br />
Comment ça, plus de 400 pages de thèses pro-putes ? Exactement ! Et c'est tout simplement brillant !<br />
<br />
Brillant dans le propos : on est loin du débat bas de plafond, on est loin de l'endoctrinement ou du prosélytisme. On est dans le juste rappel historique et sociétal, on est dans le don généreux de l'ensemble des clés nécessaires pour se forger sa propre opinion. Le discours est richement développé, les pensées solidement étayées. Aucun détail n'est laissé au hasard, aucun biais, aucun préjugé, mais sans cesse sera questionné ce qui est de l'ordre des faits, et ce qui est de l'ordre de l'opinion. <br />
Brillant dans la forme, également. Ce tome est, je pense, celui qui m'a le plus impressionné par la maîtrise de sa structure narrative, de son ton et de son rythme. Les passages racontant une histoire étant peu présents (mais formant tout de même d'indispensables respirations), il faut toute la maîtrise de l'auteur pour rendre vivant des chapitres entiers d'explications. Il va sans dire que c'est parfaitement exécuté. Qu'on ait l'impression de se faire engueuler (non, c'est pas moi, Alice, juré, craché !), qu'on finisse un chapitre en se disant : "Non mais, sérieusement <abbr></abbr>", qu'on ait envie de hurler, de répondre, de s'indigner avec ou contre les personnages, qu'on se demande où l'auteur veut en venir, on vit cette lecture avec l'intensité d'une épopée. Le propos s'arrête toujours au moment où il le doit, les respirations ponctuent parfaitement le récit, l'alternance surtout, entre les écrits d'Alice et les paroles de Lawrence, différentes mais intriquées, se répondant parfaitement avec pourtant une rupture de ton abyssale, est en elle-même un prodige. <br />
<br />
Ne croyez pas, cependant, que l'auteur en a profité pour délaisser ses personnages au profit de ses thèses. Ce tome est également celui où les deux protagonistes principaux se montrent le plus impudique. En effet, si connaître l'histoire de quelqu'un permet de le cerner, entendre la vision qu'il porte sur les choses, découvrir la façon dont il présente ses arguments, observer, surtout, de quelle façon il évoque ceux à qui il s'oppose est infiniment plus éclairant. <br />
La luminosité d'Alice éclate, irradie, déborde quand elle enfile ses gants de boxe. Même quand elle tire à boulets rouges, même quand elle me semble injuste, même quand je ne la comprends pas, je ne peux qu'admirer sa fougue, et me laisser emporter par sa passion. Par contraste, Lawrence apparaît de plus en plus sombre, en figure cynique détachée que plus rien ne peut atteindre, quand la tristesse semble s'échapper de chacune de ses phrases. <br />
<br />
Plus de 400 pages, donc, lues avec autant de fougue qu'elles semblent avoir été écrites, qui m'ont émue, attristée, offensée, enthousiasmée, fait rire... confortée, aussi, sans trop de surprise...<br />
Une lecture qui, encore, demande de l'implication et de la confiance en un auteur qui sait toujours où il veut aller, même si parfois le chemin est chaotique.<br />
<br />
Une dernière chose : ce tome peut sans trop de soucis se lire indépendamment des deux premiers. Il est (pour le moment du moins, qui sait ce que nous réserve l'avenir ?) le point d'orgue du récit, la concrétisation de ce qui a été construit durant les 2 premiers tomes. Si vous souhaitez prendre le train en route, montez à cet arrêt. Pour ma part, j'attends la suite du voyage. <br />
<br /></p>
<pre>
Du champagne, un cadavre et des putes, Tome 3
Tristan-Edern Vaquette
Du poignon productions
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Du-champagne%2C-un-cadavre-et-des-putes%2C-Tome-3#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/130Tant qu'il le faudraurn:md5:d5eedd0a0b1b7b5793591889b7b1f8c32023-03-29T15:37:00+01:002023-06-14T14:53:19+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresLectureLGBTQIMilitantismeRomanRomance <p><img src="http://unspicilege.org/public/.Tant-qu-il-le-faudra_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>J'ai lu <em>Tant qu'il le faudra</em> dans le cadre de mon challenge 12 mois, 12 livres, 12 (masto)potes, challenge qui est bientôt fini et est à peine en retard. Il m'a été conseillé par Pouhiou, qui est quelqu'un que j'apprécie particulièrement suivre sur les réseaux tant je me suis enrichie à son contact. Je le remercie donc énormément d'avoir bien voulu se prêter au jeu. <br />
<br />
<em>Tant qu'il le faudra</em>, sur le papier, c'est typiquement le genre de livre que je fuis. C'est un roman catégorisé young adult (un genre que j'ai rarement apprécié), romance (sans doute ce qui m'attire le moins) et a d'abord été écrit et publié via la plateforme Wattpad, sorte de plateforme sociale en ligne sur laquelle les utilisateurs peuvent partager leurs écrits (donc sans doute comme dans la majorité des cas sous forme de roman-feuilleton, genre qui ne m'attire pas non plus beaucoup).<br />
Cependant, je déteste suffisamment avoir des préjugés pour que ça me donne une envie folle de les pourfendre. <br />
<br />
<em>Tant qu'il le faudra</em> est une chronique qui prend part dans le milieu queer militant. On y suit les aventures d'un groupe de jeunes adultes faisant tous partie d'une association éditant une revue LGBT +. Une nouvelle rentrée débute, apportant son lot de nouvelles têtes, remettant à plat les anciennes histoires. Entre leurs études ou leur travail, leurs amours, leur engagement, on se rend compte des défis que représente le simple fait de ne pas rentrer dans les cases.</p>
<blockquote><p>C'est limite si c'est pas une performance, parfois. Certain•e•s performent leurs idées politiques comme si on était au théâtre, comme si parler et dénoncer suffisait à faire un•e militant•e. J'ai tendance à préférer les actes aux beaux discours.</p></blockquote>
<p>Malgré toute ma bonne volonté, je ne peux pas dire que j'ai adoré <em>Tant qu'il le faudra</em>. Le rythme du roman ne m'a pas convenu, le manque d'enjeux forts également. C'est une chronique, on suit donc la vie des personnages au fil de l'eau. Il m'a manqué une véritable intrigue pour tenir ce premier tome de bout en bout. Surtout, il est vraiment trop éloigné de mon univers (à part en ce qui concerne la vie parisienne - je suis avec vous sur ce coup-là !-). <br />
<br />
Cependant, le fait de le lire m'a beaucoup appris, ne serait-ce que sur ce manque de proximité. En effet, il n'est pas étonnant que je me reconnaisse peu dans les personnages, et ce n'est pas grave, je ne manque pas de livres en contenant auxquels je peux m'identifier : ma bibliothèque en est pleine, les librairies en sont pleines. En revanche, me rendre compte de cet évident état de fait m'a permis de me rappeler que les personnages jeunes, queers, handicapés, racisés ou militants ne sont en revanche pas légion dans nos fictions.
Le livre n'est pas entièrement pour moi ? Tant mieux, il parlera mieux à d'autres et c'est une chose plus que nécessaire.<br />
Cela ne m'a tout de même pas empêché de trouver beaucoup de choses enrichissantes à sa lecture : le milieu militant est dépeint à merveille, et il aborde un sujet crucial très intelligemment : ce que c'est d'être une minorité au sein même d'une minorité. <br />
<br />
Pour ses personnages extrêmement travaillés, ses situations ancrées dans un réel loin d'être facile, son message fort et juste, <em>Tant qu'il le faudra</em> ne vole cependant évidemment pas son succès, et je suis sûre qu'il a de quoi encore plaire à un nouveau lectorat. <br />
Appréciant pour ma part les lectures qui me déstabilisent, je ne regrette absolument pas cette expérience, et si vous avez envie de sortir un peu des cases pour vous faire votre propre opinion, cela vaut le coup. <br />
<br /></p>
<pre>
Tant qu'il le faudra
Cordélia
Akata
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Tant-qu-il-le-faudra#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/119Le passeururn:md5:510b9787538097aa922c36e24b006e0b2023-03-11T16:51:00+00:002023-06-14T14:54:46+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresDrameLectureRoman <p><img src="http://unspicilege.org/public/.lepasseur_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>J'ai lu Le passeur dans le cadre de mon challenge 12 mois, 12 livres, 12 (masto)potes. Il m'a été conseillé par Miguel que je remercie énormément.<br />
Je ne sais pas si mes envies m'auraient conduite vers ce livre sans cette recommandation tant je me méfie des romans s'appuyant à ce point sur des faits réels, contemporains et qui touchent quotidiennement nos émotions.<br />
<br />
Ce roman narre en effet une l'histoire de Seyoum, un très important passeur basé sur une plage libyenne, exploitant le désespoir des gens pour alimenter son commerce. Cynique et désabusé, on l'accompagne alors que l'arrivée d'un nouveau groupe de volontaires met à mal la carapace qu'il s'était forgée.<br />
<br />
J'étais très méfiante en commençant ma lecture. J'avais peur, malgré la relative brièveté du roman, qu'il se perde dans une analyse trop complexe de la situation ayant permis au passeur de mettre en place son business, qu'il nous abreuve de considérations géopolitiques, d'analyses, de jugements, de leçons, fatalement trop partiales.
J'ai été plutôt rassurée sur ce point. Sans occulter l'ancrage dans le réel de son récit, Stéphanie Coste ne s’appesantit pas sur des analyses et reste dans l'exposition de certains faits pour nourrir la personnalité de ses protagonistes. Il ne m'a pas été difficile de me détacher de cette situation particulière que j'estime ne pas assez maîtriser pour pouvoir juger de la pertinence des écrits de l'auteur.<br />
<br />
Car en effet, l'histoire qui nous est comptée est universelle : la quête de sens d'un personnage qui a sombré depuis longtemps dans le cynisme. Va-t-il finir par s'autodétruire ou va-t-il trouver une forme de rédemption ? <br />
Malheureusement, c'est là que le bât blesse un peu. Car je n'ai rien trouvé de véritablement original dans le fond. Certes, la plongée au plus profond d'une âme torturée est toujours éprouvante, et l'auteur a su donner un peu de corps à son personnage principal. Cependant, le propos de fond est une histoire vieille comme le monde, de nombreuses fois déclinée et le traitement qui en est fait par l'auteur, s'il est aussi touchant qu'un autre, n'est pas particulièrement inédit.<br />
<br />
Il reste tout de même l'écriture de Stéphanie Coste, très charnelle, et à la force immersive certaine. J'aurais aimé une histoire à sa hauteur. <br />
<br /></p>
<pre>
Le passeur
Stéphanie Coste
Gallimard / Folio
</pre>http://unspicilege.org/index.php?post/Le-passeur#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/117Le Soldat désaccordéurn:md5:6722f58774e7d89e96cbe1f2c33015572022-11-05T16:34:00+00:002022-11-05T16:34:00+00:00DeidreRomanAmourDrameGuerreLectureRoman <blockquote><p>En un instant, toutes les permissions refusées défilèrent. La voix du médecin qui me dit avec la plus grande douceur dont il pouvait faire preuve que j'allais me remettre de cette amputation, que j'allais apprendre à vivre autrement et que j'allais pouvoir retourner chez moi quelques jours. Et moi. Non. Retourner chez moi. Impossible. Ma place est ici.<br />
Ma<br />
Place<br />
Est<br />
Ici.<br />
Ma saleté de place est ici.</p></blockquote>
<p>Entre deux guerres, un ancien combattant trop esquinté pour rester soldat est chargé de retrouver un fils perdu sur les champs de bataille. En découvrant la grande histoire d'amour de ce disparu, il se jette à corps perdu dans cette quête insensée, à la recherche d'un homme, de l'amour, de la rédemption dans un monde glissant vers une prochaine guerre.<br />
<br />
De cette histoire bouleversante, Gilles Marchand tire un roman d'une grande poésie et d'une profonde mélancholie. Mêlant judicieusement le récit de guerre à l'enquête et à une idylle passionnée, il réussit à nous emporter dans les méandres de la progression de son personnage principal, obsédé tout autant par ses investigations que par ses propres démons.<br />
Il réussit également parfaitement à retranscrire l'impact de la guerre sur les corps et les âmes, et l'ambiance si paradoxale de l'après-guerre, sa profonde transformation de la société.<br />
L'écriture de Gilles Marchand est inventive et colorée, s'adaptant à merveille au réel comme à l'onirisme. Évocatrice, aussi...<br />
<br />
Je l'ai déjà dit, les histoires d'amour m'emmerdent le plus souvent. Celle du <em>Soldat désaccordé</em> va cependant tellement au-delà d'une simple romance. C'est un récit aussi désespéré qu'optimiste, un véritable vortex de sentiments. Une lecture très émotionnelle.<br />
<br /></p>
<pre>
Le soldat désaccordé
Gilles Marchand
Aux Forges de Vulcain
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.Le-Soldat-desaccorde_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Le-Soldat-d%C3%A9saccord%C3%A9#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/95Entre ciel et terreurn:md5:4720f2c5339c5834d61c916197238ed82022-10-19T16:34:00+01:002022-10-19T16:34:00+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresDrameLectureRoman <blockquote><p>Ils avancent à vive allure — juvéniles jambes, feu qui flambe — , livrant également contre les ténèbres une course tout à fait bienvenue puisque l'existence humaine se résume à une course contre la noirceur du monde, les traîtrises, la cruauté, la lâcheté, une course qui paraît si souvent tellement désespérée, mais que nous livrons tout de même tant que l'espoir subsiste.</p></blockquote>
<p>En Islande, il y a un siècle, un pêcheur, trop absorbé par les vers du <em>Paradis perdu</em> de Milton, en oublie sa vareuse avant de prendre la mer, et meurt de froid. À terre, le gamin qui le considère comme son meilleur ami, se lance dans un voyage sans autre sens que la recherche du deuil, pour rendre le livre incriminé à son propriétaire.<br />
<br />
J'ai lu <em>Entre ciel et terre</em> dans le cadre de mon challenge 12 mois, 12 livres, 12 (masto)potes. Il m'a été recommandé par Septie que je remercie beaucoup. Je ne connaissais absolument pas le livre, ni l'auteur, ma lecture n'en a été que plus déroutante.<br />
C'est, je pense, (pour le moment, du moins) le livre dans lequel j'ai eu le plus de mal à rentrer. Peut-être en raison du roman lui-même, peut-être en raison de mon état d'esprit du moment, en proie à la fatigue morale et intellectuelle qui me touche souvent à cette période. Toujours est-il que les mots et le récit de Jón Kalman Stefánsson m'ont fait entrer dans une profonde mélancolie qu'il a été compliqué de dépasser pour trouver la lumière de la poésie incrustée dans ce texte.<br />
<br />
L'Islande y est une terre rude, âpre, et les existences qui peuplent ce roman sont périlleuses, faites de travail exténuant, de difficultés, de chagrins... Il me fut impossible de ne pas être douloureusement touchée par leurs histoires.<br />
Cependant, tout comme "le gamin" trouve dans sa quête des raisons de continuer, je me suis accrochée aux mots, à leur puissante poésie, à leur force évocatrice, à l'amour que l'on voue toujours aux terres les plus ingrates comme on aime parfois encore plus intensément ce qui nous met en difficulté.<br />
<br />
Entre ciel et terre est un roman que j'ai trouvé difficile, dont la lecture fut une véritable expérience émotionnelle, dont je suis sortie étourdie.<br />
<br /><br /></p>
<pre>
Entre ciel et terre
Jón Kalman Stefánsson
Traduit par Eric Boury
Gallimard/folio
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.Entre_ciel_et_terre_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Entre-ciel-et-terre#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/97Les fils de l'hommeurn:md5:446018b01027f7993961876cf836d5682022-09-07T15:28:00+01:002022-09-24T11:40:14+01:00DeidreFantastiqueDrameDystopieLecturePolarRoman <blockquote><p>- Oui. La colonie pénitentiaire de Man. Vous savez ce qui s'y passe ? Vous êtes au courant des meurtres, de la famine, de l'anarchie galopante ? <br />
- Oui, fit Xan. La question est de savoir comment toi, tu es au courant ?"<br />
Theo ne répondit pas. La question impliquait une menace dont il avait pleinenement conscience.</p></blockquote>
<p>Des Fils de l'homme, j'ai surtout entendu parler (en bien) du film de Alfonso Cuarón, que je n'ai pas vu<sup>[<a href="http://unspicilege.org/index.php?post/Les-fils-de-l-homme#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Une histoire d'anticipation sombre, une humanité stérile... <br />
J'ai ensuite trouvé le livre de P.D. James au hasard de mes fouilles dans une librairie d'occasion. J'ignorais totalement que le film était inspiré d'un livre de cette grande dame du roman policier, et, si j'ai lu dans mes jeunes années quelques-unes de ses œuvres, j'ignorais également qu'elle s'était frottée au genre fantastique. Forte de ces découvertes, j'ai immédiatement eu envie de le lire.<br />
<br />
<em>Les fils de l'homme</em> est donc un roman d'anticipation écrit en 1992 et se déroulant en Angleterre en 2001. Quand l'intrigue commence, le dernier humain né sur terre vient de mourir à l'âge de 25 ans. 25 ans donc, sans aucune nouvelle grossesse : l'humanité est mourante, condamnée. Le gouvernement a profité de ce désespoir et de la peur qu'il engendre pour instaurer un régime dictatorial, sous la coupe du Gouverneur Xan Lyppiatt. Le protagoniste principal de l'histoire en est le cousin. Ayant renoncé à un poste à responsabilités, il est historien et est bientôt abordé par un groupuscule de résistants.<br />
<br />
Je n'en dirai pas plus sur l'histoire, ni sur l'élément central qui se retrouve aussi dans le film <sup>[<a href="http://unspicilege.org/index.php?post/Les-fils-de-l-homme#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>(sait-on jamais...). Ce n'est honnêtement pas cela qui m'a le plus marqué. J'ai surtout été épatée par l'immense dimension politique et sociétale de l'ouvrage. En effet, P.D. James a savamment décortiqué les impacts sociaux que l'épidémie de stérilité a engendrés.<br />
Que dire de l'évolution des membres de la dernière génération, qui, fatalement élevés au rang de miracles, sont devenus des tyrans ? Condamnés à ne pas trouver de sens à leur arrivée sur Terre, ils laissent libre cours à leur brutalité.<br />
Que dire de ce qui reste de l'humanité qui, désespéré, s'agglutine dans les villes pour y trouver un semblant de repères faussement rassurants ? Sans espoir aucun, sans transmission possible, les gens perdent peu à peu le goût du changement jusqu'à en développer une peur panique. <br />
Que dire du gouvernement en place qui, aussi totalitaire que lâche, se borne à maintenir un semblant de normalité, de constance dans un monde qui court à sa perte ? Sans résistance ou presque, il ne lui est pas difficile de conserver son hégémonie en instillant l'idée d'une stabilité illusoire, entretenue par des choix intolérables. <br />
<br />
C'est donc une ambiance assez désespérée qui s'offre à nous. Le roman garde certains codes du thriller comme un rythme qui s'accélère et des rebondissements qui dynamisent la lecture et m'ont tenue en haleine, tournant les pages, avalant les lignes, cherchant des réponses... jusqu'à une fin assez brutale, qui prolonge les réflexions au-delà de la lecture.<br />
<br />
<em>Les fils de l'homme</em> est un excellent livre, si on n'a pas peur de se frotter à la désespérance. Intelligent et réaliste, il secoue profondément et interroge...<br /></p>
<pre>
Les fils de l'homme
P.D. James
Traduit par Éric Diacon
Fayard/Le livre de poche
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.fils_de_l_homme_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="http://unspicilege.org/index.php?post/Les-fils-de-l-homme#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] J'ai bien l'intention de le voir, mais j'écris volontairement cette chronique avant.</p>
<p>[<a href="http://unspicilege.org/index.php?post/Les-fils-de-l-homme#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] J'ai cependant l'impression que l'adaptation s'éloigne significativement de son matériau d'origine.</p></div>
http://unspicilege.org/index.php?post/Les-fils-de-l-homme#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/88Antigoneurn:md5:ecb009bb45bee2f7444d5f9e172bf7e42022-07-10T11:39:00+01:002022-09-24T11:42:21+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresDrameHistoireLectureMythologieRoman <p>J'ai découvert <em>Antigone</em> dans le cadre de mon challenge 12 mois, 12 livres, 12 (masto)potes. Il m'a été recommandé par Valérie, que je remercie beaucoup pour la découverte.<br />
En effet, <em>Antigone</em> est un livre qui m'a particulièrement touchée, dans son propos, dans l'étrange poésie qu'il dégage, dans l'inévitable drame qu'il évoque.<br />
<br />
Pour ceux qui ne sont pas familiers avec la mythologie, Antigone est la fille incestueuse de Œdipe et Jocaste, souverains de Thèbes. Après avoir découvert la vérité, sa mère se suicide et son père se crève les yeux avant de s'exiler de la cité. Antigone passera alors de nombreuses années à guider son père devenu aveugle dans sa vie de mendiant. Au début du roman, elle revient à Thèbes à la mort de son père pour essayer de mettre fin à la guerre fratricide que se livrent ses deux frères Polynice et Étéocle pour le trône de Thèbes. <br />
<br />
J'ai toujours aimé les mythes et j'ai passé de nombreuses heures de lecture autour des légendes grecques. Ce sont toujours des récits épiques, entachés de trahisons et de drames, la plupart du temps anticipés et inévitables, les rendant tragiques. J'ai retrouvé cette atmosphère dramatique dans le livre d'Henry Bauchau puisque, encore une fois, rien ne semble pouvoir arrêter le destin. <br />
<br />
Mais au-delà de l'histoire en elle-même, ce sont bien les qualités intrinsèques à l'œuvre de Bauchau qui m'ont bouleversée. L'histoire d'Antigone permet en effet à l'auteur de dresser un portrait de femme de toute beauté. Sous sa plume, Antigone est puissante, dissidente, d'une volonté de fer, d'une sensibilité de feu, une héroïne éclatante. Les autres personnages sont également bouleversants, comme les frères jumeaux Polynice et Étéocle, tragiques dans leur rivalité teintée d'une affection inaltérable, infernaux dans leur entêtement malgré le drame inévitable qui s'annonce. Bauchau donne également vie à une Ismène toute en nuances dans le mélange d'amour et d'opposition qui l'unit à sa soeur, lui donnant une puissance différente d'Antigone mais tout aussi ardente.Quant à Thèbes, l'imposante cité royale qui est le théâtre des évènements, il en fait un personnage à part entière, aussi accueillante que dévorante dans sa cruelle exigeance de richesses. <br />
L'écriture d'Henry Bauchau est d'une poésie folle et certains chapitres bouleversants d'émotions (je pense par exemple au passage de l'élaboration des sculptures) font de la lecture d<em>'Antigone</em> une expérience sensorielle et intellectuelle intense. <br />
<br />
Il me reste donc à vous conseiller à mon tour de vous plonger dans <em>Antigone</em>, un superbe roman qui m'a donné envie de lire d'autres œuvres d'Henry Bauchau. <br />
<br /></p>
<pre>
Antigone
Henry Bauchau
Actes Sud / Babel
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.antigone_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Antigone#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/85Homer & Langleyurn:md5:363c7eda7fee0e8b5c5b6ab89f6297312022-06-08T17:00:00+01:002022-09-24T11:43:02+01:00DeidreRomanHistoireLectureRoman <blockquote><p>Langley disait : Qui se soucie de ce qu'étaient nos distinguées ancêtres ? Quelle foutaise. Tous ces comptes rendus de recensements, toutes ces archives n'attestent que la suffisance de l'être humain qui se donne un nom et une tape sur l'épaule, et ne reconnaît pas son insignifiance devant les évolutions de la planète.</p></blockquote>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fr%C3%A8res_Collyer">L'histoire dramatique (et vraie) des frères Collyer</a>, les "frères fantômes" de Harlem est un cas d'école des effets tragiques de la syllogomanie, le syndrome d'accumulation compulsive pouvant rendre une habitation totalement insalubre et impraticable.<br />
E.L. Doctorow prend des libertés avec ce fait divers célèbre, et nous offre un roman au temps long, retraçant une épopée américaine balayant une grande partie du XXème siècle.<br />
<br />
A travers les "yeux" du sensible Homer, le narrateur, le pianiste aveugle que son frère Langley se charge de protéger, c'est une histoire des Etats-Unis qui nous est contée, de l'après-guerre aux années 70. Au rythme des (rares) rencontres et actions des frères reclus, les périodes marquantes sont évoquées, comme la prohibition, la Seconde Guerre mondiale (qui affectera leurs domestiques japonais), le mouvement hippie... Les deux frères, issus de la vieille aristocratie New-yorkaise, posent un regard bien particulier sur tout cela, souvent candide et ébloui pour Homer, plus cynique et méfiant pour Langley qui est revenu gazé de la Première Guerre mondiale.<br />
Mélangeant l'Histoire avec l'histoire, le roman narre aussi comment la santé mentale de l'un, et la santé physique de l'autre (d'abord aveugle puis progressivement sourd) vont contribuer à leur isolement et leur paranoïa. Avec une infinie délicatesse et beaucoup d'empathie envers ses personnages, l'auteur nous partage le quotidien de ces êtres atypiques et attachants.<br />
<br />
<em>Homer & Langley</em> est donc un livre parfois tendrement drôle, bigrement enrichissant et toujours fort émouvant que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire.<br />
<br /></p>
<pre>
Homer & Langley
E.L. Doctorow
Traduit par Christine Le Bœuf
Actes Sud
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.homerlangley_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Homer-Langley#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/83Siddharthaurn:md5:51565a99bf8d001894f2bfbbf331cc632022-04-20T16:30:00+01:002022-09-24T11:47:24+01:00DeidreRoman12 mois - 12 livresLecturePhilosophieRoman <p>J'ai lu <em>Siddhartha</em> après qu'il m'ait été conseillé par Christophe dans le cadre de mon défi 12 mois, 12 livres, 12 (masto)potes. <br />
Si vous ne connaissez pas Christophe, aka <a href="https://diaspodon.fr/@_Christ_OFF_">Christ_OFF_ sur Mastodon</a> ou
<a href="https://twitter.com/PostTenebLire?t=39iR8ZHwcc6EjD1k2Q66MQ&s=09">PostTenebLire sur Twitter</a>, commencez par <a href="https://post-tenebras-lire.net/">aller jeter un oeil à son blog</a>, il y parle lectures et c'est une des personnes dont je peux suivre l'avis les yeux fermés (même si c'est pas commode pour lire), ce que je fais depuis quelques années à présent (comme le temps fil sur les réseaux aussi...). Ses avis sont toujours assurés et pertinents, ses goûts éclectiques... j'y trouve toujours ce que je n'étais pas venue y chercher (un point bonus si vous aimez le Japon) !<br />
L'instant promo-pour-le-copain (ça va, je fais comme tout le monde dans le milieu du livre après tout ! C'est juste que dans mon cas, il le mérite vraiment), je n'ai donc pas hésité une seule seconde à me plonger dans ce court roman que je connaissais sans connaître. Christophe a, une fois de plus, réussi à me surprendre avec un conte initiatique philosophique qui change de nos lectures communes (décidément, cet homme est formidable !).<br />
<br />
L'intrigue de <em>Siddharta</em> est volontairement assez évasive sur l'époque, mais se déroule en Inde où l'on suit le parcours initiatique du personnage éponyme, un fils de brahmane, soit un membre de la caste des religieux et/ou érudits. En quête de sagesse, Siddharta s'oppose à son père et se met à voyager pour atteindre son but. S'ensuivront plusieurs époques, pendant lesquelles il sera tour à tour mendiant, commerçant, passeur, avant que ses expériences anciennes le rattrapent.<br />
<br />
Tout l'intérêt de suivre la route de Siddharta n'est pas dans l'histoire qu'il raconte mais dans le but qu'il cherche à atteindre. Très tôt dans le roman, il s'oppose à son meilleur ami qui lui, a décidé d'accéder à la sagesse en suivant les préceptes d'un autre. Siddharta, au contraire, pense que la sagesse ne peut s'acquérir qu'en suivant sa propre voie.<br />
Chemin faisant, ce sont mes propres buts qui m'ont sauté aux yeux puisque j'aspire à la même sagesse et que je pense, comme lui, qu'elle ne s'apprend pas mais est le fruit d'un cheminement intérieur, alimenté par les rencontres et expériences vécues. C'est donc avec grand intérêt et beaucoup d'insomnies que je me suis nourrie de <em>Siddharta</em>, enrichissant beaucoup mes propres réflexions, m'aidant à faire un pas de plus sur ce chemin si tortueux.<br />
Cela ne m'a d'ailleurs pas empêchée de m'attacher au personnage en lui-même et de m'intéresser à une intrigue qui reste prenante.<br />
<br />
Je n'en dirai pas plus car ce fut une lecture très intime et spirituelle et qu'il est difficile de poser des mots sur toutes les questions qu'elle a soulevées. Siddhartha est de ces romans qui fait se prolonger longtemps l'expérience de lecture. Je ne peux que vous encourager beaucoup à tenter l'expérience.<br />
<br /></p>
<pre>
Siddhartha
Hermann Hesse
Traduit par Joseph Delage
Livre de poche
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.siddartha_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Siddhartha#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/75Underdog Samuraiurn:md5:68e8d709986a8d1884924f6e4ae2cadf2022-03-09T17:00:00+00:002022-09-24T11:48:06+01:00DeidreFantastiqueFantastiqueHumourLectureRoman <blockquote><p>Hahaha ! Toi aussi, ils t'ont foutu dehors ?<br />
Toujours sur le parking, je me retourne et remarque un vieux clochard assis en tailleur au niveau des bennes à ordure. Il est installé sur un carton taché de vin, la bouteille bien entamée juste à côté. Sa barbe dégouline et ses dents aussi inégales que colorées me dégoûtent. Bon sang, ce n'est vraiment pas le moment.</p></blockquote>
<p>Heureusement que je ne me suis pas fiée aux retours de lecteurs invoquant Tarantino à tout va (d'ailleurs, arrêtez d'évoquer Tarantino comme la preuve suprême de la qualité d'une œuvre, vraiment, certains sont fragiles à ce niveau-là), tant le premier livre que j'ai lu de Romain Ternaux était impossible à rapprocher du style de qui que ce soit (<a href="https://atraverslamarelle.org/i-am-vampire-romain-ternaux-aux-forges-de-vulcain">j'en parle ici, si besoin</a>).<br />
Le sensei alcoolique m'a pour ma part fait penser à <em>Mr Flap</em> (si vous ne connaissez pas, <a href="https://www.france.tv/slash/monsieur-flap/">filez regarder cette formidable série !</a>). Vais-je pour autant parler de <em>Underdog Samurai</em> comme d'un mélange de Mr Flap et d'un dimanche aux puces de Saint Ouen ? <br />
Non, parce qu'il est temps d'arrêter les comparaisons foireuses, <em>Underdog Samurai</em> ne ressemble à rien de connu, et c'est ce qui en fait un roman d'enfer. <br />
Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer.<br />
<br />
Impossible de résumer ce roman sans se perdre dans des circonvolutions infinies : il parle de la sombre histoire de vengeance d'un consommateur trompé sur la marchandise, évoque le Japon (beaucoup), la filiation (pas mal), Jean-Louis Costes (brièvement, mais ça mérite d'être souligné), d'autres choses (innombrables et indicibles)... Je n'ai pas trouvé de meilleure façon de l'évoquer que comme une succession de "ce n'est pas le moment". Il se passe des centaines de choses dans ce roman et ça n'est jamais le moment.<br />
<br />
J'ai adoré retrouver la richesse de l'univers de Romain Ternaux ; son audace, son irrévérence, la façon qu'il a de tordre le temps du lecteur, de l'accélérer jusqu'à le précipiter.... <br />
Sa manière, surtout, de partir d'un univers ultra référencé pour le sublimer, pour aller bien au-delà des clichés et inventer d'autres codes. C'est ce qui rend ce livre impossible à rapprocher d'autres œuvres, ça serait passer à côté de son essence même. <br />
Romain Ternaux réussit à nous embarquer dans une farce grotesque, à l'humour trash omniprésent, tout en sachant parfaitement où nous mener avec une maitrise absolue de son histoire et de son sujet. <br />
Je suis une fois de plus conquise !
<br /></p>
<pre>
Underdog Samurai
Romain Ternaux
Aux Forges de Vulcain
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.underdog_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Underdog-Samurai#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/70Je m'en vaisurn:md5:837183de0220a682e7e1ff65cb22bb1d2022-02-16T16:02:00+00:002022-09-24T11:48:20+01:00DeidreRomandéfi 12HumourLectureRoman <blockquote><p>Je m'en vais, dit Ferrer, je te quitte. Je te laisse tout mais je pars. Et comme les yeux de Suzanne, s'égarant vers le sol, s'arrêtaient sans raison sur une prise électrique, Félix Ferrer abandonna ses clefs sur la console de l'entrée. Puis il boutonna son manteau avant de sortir en refermant doucement la porte du pavillon.</p></blockquote>
<p>J'ai lu ce livre dans le cadre d'un petit défi que je me suis lancé cette année : pendant les 12 prochains mois, lire 12 livres conseillés par 12 (masto)potes, c'est-à-dire 12 personnes issues de mes contacts sur le réseau social Mastodon (si tu m'y cherches,<a href="https://diaspodon.fr/@Deidre"> je suis là</a>). Le but du jeu est de me faire sortir de ma zone de confort, et cela porte ses fruits puisque pour ce tout premier livre, Panais m'a conseillé un monument de la littérature française contemporaine que je n'avais jamais lu : Jean Echenoz, avec <em>Je m'en vais</em>, qui a reçu le prix Goncourt en 1999.<br />
<br />
Je me suis rendu compte quand j'ai annoncé être en train de le lire qu'un nombre non négligeable de mes contacts appréciaient beaucoup ce livre, et Echenoz en général. Si mon avis est plus nuancé, je ne peux pas cacher avoir passé un bon moment.<br />
<br />
En effet, <em>Je m'en vais</em> est assez déroutant. Je n'ai pas beaucoup accroché au personnage principal et n'ai pas été plus emballée que ça par une intrigue assez mouvante et peu étoffée, en revanche...<br />
<br />
En revanche...<br />
<br />
Le style de l'auteur a fini par balayer toutes mes réticences. Ce n'est pas tant l'histoire qui m'a plu, mais le ton avec lequel elle est narrée ; la désinvolture, l'ironie, l'humour omniprésent et une écriture particulièrement ciselée. J'ai aimé la façon qu'a eu l'auteur de raconter, sa façon de décrire, de nous faire voyager, le subtil détachement qui émerge de ses lignes lorsqu'il prend du recul sur ses personnages. Certaines phrases sont des bijoux de raffinement, et l'atmosphère générale est des plus réjouissantes. L'ombre d'Echenoz est présente à chaque page. <br />
<br />
Le roman étant suivi d'un entretien avec l'auteur (<em>Dans l'atelier de l'écrivain</em>), cela a fini de me convaincre : je n'ai peut-être pas complètement réussi ma rencontre avec <em>Je m'en vais</em>, mais j'ai totalement réussi celle avec Echenoz.<br />
<br />
<br /></p>
<pre>
Je m'en vais
Jean Echenoz
Les éditions de minuit
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.jemenvais_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Je-m-en-vais#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/72Mort™urn:md5:1c27e7c2168eed639c3e1047237dca492022-02-09T14:57:00+00:002022-09-24T11:48:33+01:00DeidreFantastiqueDystopieFantastiqueLectureRomanScience-fiction <blockquote><p>«Bonjour citoyen. Contrôle de l'Allégeance, s'il vous plaît.»<br />
La visière qui lui recouvre intégralement le visage analyse Rasmiyah et débite tout un tas d'informations à son sujet. Rasmiyah dit:<br />
«Oui, oui, je vous le montre. »<br />
Elle sort de sous son vêtement un collier de nouilles. Le policier, impassible, scanne l'objet et dit:<br />
«Date de fabrication ?<br />
- Trois jours.<br />
- Quelle est votre religion ?<br />
- Actuellement je prie Glycon, le Dieu Serpent. »</p></blockquote>
<p>Mort™ constitue le 3ème et dernier tome de la trilogie Trademark de Jean Baret après <a href="https://atraverslamarelle.org/lu-bonheur-jean-baret-le-belial"><em>Bonheur™</em></a> et <a href="https://unspicilege.org/index.php?post/Vie"><em>Vie™</em></a>. J'aimerais dire qu'il la clôt, mais l'auteur lui-même rappelle qu'il n'y a pas d'ordre de lecture. <br />
J'avoue cependant que l'ordre de parution me parait l'ordre de lecture le plus pertinent. Clore la trilogie par ce tome, particulièrement, permet d'en comprendre les subtilités.<br />
<br />
En effet, l'auteur reprend dans ce livre des éléments des deux précédents opus, plaçant au final les deux premiers univers dans le même espace-temps : une mégalopole titanesque divisée en quartiers hermétiquement clos. Apparaît enfin un nouvel univers, celui de l'héroïne Rasmiyah, qui, en tant que citoyenne du quartier de Babel doit obligatoirement appartenir activement à l'une des religions expressément autorisées par les autorités. Nous suivrons son parcours tout au long du récit, ainsi que celui de Xiaomi, journaliste gonzo citoyen du quartier de Mandé-ville (ombre de l'écrivain du même nom) décrit dans <em>Bonheur™</em>, et de Donald Trompe, aka DN4n93xw, citoyen du quartier d'Algoripolis évoqué dans <em>Vie™</em>.<br />
Au croisement de ces 3 univers qui se connaissent en s'ignorant volontairement se trouve la M-Théorie, qui leur promet de changer à jamais leur vision des choses.<br />
<br />
Si l'histoire peut sembler complexe, elle est en fait racontée avec une fluidité implacable. <br />
Jean Baret réussit une nouvelle fois à nous entraîner dans une marche forcée vers une fin qui semble inéluctable avec une précision d'horloge, alternant minutieusement (mécaniquement ?) les points de vue. <br />
Il y a une dimension extrêmement philosophique dans l'oeuvre de Baret, et la comparaison ultime de ces trois univers aussi différents que répondant au final aux mêmes impératifs, tout en niant la nécessité de l'existence des autres clos magistralement l'exercice de style entamé dans les premiers romans de la trilogie.<br />
Baret écrit de la SF infiniment contemporaine, extrêmement dérangeante dans la facilité avec laquelle elle réussit à mettre le lecteur dans le même état d'esprit que ses personnages : aliéné, intrigué, et au final résigné. La lecture de <em>Mort™</em> est en cela particulièrement déprimante car elle ne rend pas triste, non... elle rend "rien". Inerte, indifférent, apathique...<br />
<br /></p>
<pre>
Mort™
Jean Baret
Le Bélial'
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.morttm_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Mort#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/68Crash !urn:md5:a9d22149e352e0cda2926626b197512e2022-02-02T16:47:00+00:002022-09-24T11:49:30+01:00DeidrePolicierFantastiqueLectureRomanThriller <blockquote><p>C'est après ma première rencontre avec Vaughan que j'ai commencé à comprendre la véritable nature de l'accident d'automobile. Propulsée par une paire de jambes de longueur inégale, cousue des cicatrices de nombreuses collisions, la figure hirsute et troublante de ce savant renégat est entrée dans ma vie à une époque où ses obsessions avaient de toute évidence tourné à la démence.</p></blockquote>
<p>Je ne pouvais pas acheter et lire <em>Crash !</em> sans penser à l'adaptation sur grand écran qu'en a fait David Cronenberg. Cronenberg est l'un de mes réalisateur préféré, celui qui explore avec brio le genre du body horror. Il est vrai que l'on retrouve une certaine fascination pour les corps meurtris dans <em>Crash !</em>, sans que l'on puisse vraiment rattacher le film à ce genre. Pourtant, son visionnage m'a laissé un sentiment en mi-teinte. Je ne l'ai pas trouvé aussi provocateur qu'on le dit, ni choquant, les corps n'étant pas si malmenés, les scènes de sexes explicites ne suffisant pas, et la véritable profondeur des personnages m'ayant échappé, l'ennui m'ayant gagné... Je suis restée sur l'impression d'avoir loupé quelque chose de plus profond...<br />
<br />
À la lecture du roman de James Graham Ballard, c'est tout un nouvel abysse de réflexions qui s'est ouvert à moi. <br />
<br />
Pour ceux qui ne connaissent pas l'histoire, <em>Crash !</em> narre le parcours de son narrateur (Ballard) qui, à la suite d'un accident de voiture lors duquel il a causé la mort d'un homme, se retrouve entraîné à la suite de Vaughan, personnage obsessionnel, dans une course sans fin, mêlant désir, violence et fascination pour la mécanique et l'empreinte qu'elle laisse lorsqu'elle se déchaîne sur les corps.<br />
<br />
Si on a coutume de dire que le livre explore la perversion sexuelle, les protagonistes trouvant leur jouissance dans l'exploration des accidents de voiture, il est surtout question d'obsession et de comment celle-ci finit par dominer et conditionner complètement le déroulement d'une vie, entraînant tous les proches vers une fin précipitée et inévitablement tragique. J'ai retrouvé à la lecture ce qui m'avait manqué dans le film : une véritable exploration des sentiments et réflexions de Ballard, une plongée dans la psyché des personnages, permettant de comprendre mieux ce qui les motive et les entraîne.<br />
Sans aucun jugement sur la nature de leur obsession, c'est la domination même des pulsions qu'il est intéressant à suivre alors.<br />
<br />
Au final, la lecture de Crash ! fut particulièrement enrichissante, apportant également un angle nouveau à l'adaptation de Cronenberg qu'il me tarde de revoir. <br />
<br /></p>
<pre>
Crash !
James Graham Ballard
Traduit par Robert Louit
Calmann-Levy/Presses Pocket
(Disponible en Folio)
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.crash_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Crash-%21#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/65Feminicid - Une chronique de Mertvecgorodurn:md5:407aa07bc040e4f2517e76fe7ed31afd2022-01-18T16:49:00+00:002024-01-21T15:39:03+00:00DeidreFantastiqueDystopieFantastiqueLectureMertvecgorodRoman <blockquote><p>Première série de crimes : 8 septembre 2001 - 15 mars 2013
Seconde série de crime : débutée le 15 octobre 2018
Nombre de victimes annuelles selon les critères établis par mes soins et détaillés plus bas : 50 à 100</p></blockquote>
<p>Quel plaisir de retrouver l'univers poisseux de Mertvecgorod dans cette seconde chronique. Après le formidable <em>Images de la fin du monde</em> (<a href="http://unspicilege.org/index.php?post/Images-de-la-fin-du-monde-%3A-Chroniques-de-Mertvecgorod">dont je parle ici</a>, un de mes plus grands coups de cœur de l'année dernière), Christophe Siébert nous plonge cette fois au cœur de l'enquête du journaliste Timur Domachev, qui, avant sa fin tragique, avait levé le voile sur une série de meurtres ayant pour victimes des jeunes femmes souvent retrouvées horriblement mutilées.<br />
<br />
Christophe Siébert réussit une fois de plus à nous plonger dans la lie de l'humanité avec un récit encore une fois hybride, mêlant chroniques, journal de bord, articles et récits. En retraçant l'enquête de Domachev, il nous permet d'en apprendre plus sur des personnages déjà évoqués dans le précédent opus.
De ce dédale tortueux, slalomant entre la pitié et le dégoût, Mertvecgorod n’apparaît que plus palpable encore. Vivant organe toxique d'une humanité à la dérive, personnification des déceptions, des cauchemars, des fantasmes tordus de ses protagonistes. En développant encore plus la mythologie profonde de son univers, l'auteur en renforce son intensité autant que sa fascinante attractivité.<br />
<br />
S'inspirant de faits réels pour enrichir son récit, piochant également dans la mythologie germanique, il accouche d'une oeuvre encore une fois inclassable, une épopée suffocante, aussi sournoise que dérangeante, dans laquelle le fantastique se mêle à un réel halluciné, creuset idéal permettant à son écriture de développer toute la force de son immense poésie. Je fus encore une fois frappée par le style de Siébert, unique, profond, en parfaite harmonie avec le récit qu'il fait.<br />
<br />
Bien loin des romans tape-à-l'oeil, Feminicid défonce les codes. Ici l'horreur est subtile, sournoise, elle colle à la peau et ne te quitte pas tout le long de ta lecture, t'interrogeant sur ton propre plaisir à la lire...<br />
<br /></p>
<pre>
Feminicid
Christophe Siébert
Au Diable Vauvert
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.feminicid_s.jpg" alt="" class="media-right" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Feminicid#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/66Le secret de Copernicurn:md5:feb34739bfb622f2bf0f09a68d9178ac2022-01-02T10:01:00+00:002022-09-24T11:50:21+01:00DeidreRomanHistoireLectureRomanSciences <blockquote><p>Rheticus se leva et s'approcha de la <em>Melancholia</em> de Dürer, dont il avait déjà vu des reproductions à Nuremberg. Mais cette fois, il la comprenait. Il comprenait d'où venait cette terrible beauté. Le visage sombre de l'archange, c'était celui de Copernic, il y avait quarante ans peut-être, mais c'était lui.</p></blockquote>
<p>J'ai toujours aimé Jean-Pierre Luminet dont je connais surtout le travail d'astrophysicien. J'ai lu plusieurs de ses ouvrages et vu plusieurs de ses conférences tant j'apprécie son talent de vulgarisateur. Je n'avais cependant jamais lu un de ses romans, j'ai donc décidé de commencer par le premier tome de sa série <em>Les bâtisseurs du ciel</em>, celui consacré à l'astronome Copernic.<br />
<br />
De Copernic, on a souvent en tête qu'il fut le premier à avoir défendu la théorie de l'héliocentrisme dans son ouvrage <em>De Revolutionibus Orbium Coelestium</em>, voire qu'il aurait eu des problèmes avec l'église de ce fait (le confondant alors avec Galilée). Grâce à cette biographie romancée extrêmement fournie, Luminet nous compte en détail la vie et l'oeuvre du savant polonais.<br />
Ne vous attendez pas, cependant, à un ouvrage scientifique : j'ai bien eu entre les mains un roman historique, qui m'a plongée dans l'Europe du XVème-XVIème siècle. Car outre sa casquette de scientifique, Copernic était également chanoine et soumis à de nombreuses luttes d'influence. <br />
<br />
J'ai particulièrement aimé cette lecture qui m'en a beaucoup appris sur Copernic (que je connaissais finalement peu) mais aussi sur le paysage scientifique, politique et religieux de son époque. Luminet exprime dans ce livre les mêmes qualités que dans ses autres écrits : nous présenter beaucoup de connaissances de la manière la plus intéressante qu'il soit. Je trouve extrêmement important, lorsqu'on s'intéresse à la science, de s'intéresser aussi à son histoire et cette série est un excellent moyen d'y parvenir.<br />
<br /></p>
<pre>
Le Secret de Copernic
Jean-Pierre Luminet
JC Lattès - Le livre de poche
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.Le-secret-de-Copernic_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/Le-secret-de-Copernic#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/61MORTSurn:md5:81e3be8c3cc41c356301a7661df97db62021-12-06T13:19:00+00:002022-09-24T11:50:42+01:00DeidreFantastiqueFantastiqueHumourLectureRoman <blockquote><p>Alors qu'il venait de mourir, Joseph se réveilla...</p></blockquote>
<p>Quelle étrange chose que ce roman de Philippe Tessier !
Je l'ai choisi essentiellement pour sa couverture (signée Fabrice Angleraud) ; un peu pour son résumé aussi : un mort qui revient à la vie, se retrouve à déambuler au milieu de squelettes particulièrement vifs en essayant de comprendre ce qu'il se passe...jusqu'à croiser la mort elle-même, qui s'ennuie... à mourir (j'ai presque honte).<br />
<br />
MORTS est, je crois, un immense délire tout droit sorti du cerveau déjanté de l'auteur. Une farce féroce et aiguisée se cache sous un roman des plus louches ! J'ai passé beaucoup de temps à me demander ce que j'étais en train de lire, beaucoup aussi à me dire que décidément, ces idées sont sacrément bien vues, il me plaît cet auteur, je lui paierais bien une bière !<br />
<br />
Il ne faut pas, je crois, essayer de comprendre où Philippe Tessier veut en venir. Juste profiter de ses bons mots, de sa vision acérée des vivants (qui se devine tellement bien quand il met en scène des morts) et rire ; beaucoup. <br />
MORTS est sans nul doute un des livres les plus bizarres que j'aie lu ces derniers temps... que l'auteur en soit chaleureusement remercié car ça fait du bien !</p>
<pre>
MORTS
Philippe Tessier
Éditions Leha
</pre>
<p><img src="http://unspicilege.org/public/.morts_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>http://unspicilege.org/index.php?post/MORTS#comment-formhttp://unspicilege.org/index.php?feed/atom/comments/60